Full text: Les merveilles célestes

     
  
216 LES MERVEILLES CÉLESTES. 
regarde et celles de l'hémisphére que nous ne voyons pas. 
Vous n'avez pas été sans remarquer, en effet, que la 
Lune nous présente toujours la méme face. Depuis le 
commencement du monde elle ne nous a jamais montré 
que ce cóté-là. Nous lisons dans Plutarque, qui écrivait il 
y a prés de deux mille ans, mille conjectures relatives à 
cette face de la Lune éternellement tournée vers nous. Les 
uns disaient que c'était un grand miroir, bien poli et ex- 
cellent, qui nous renvoyait de loin l'image de la Terre : 
les parties sombres représentaient l'Océan et les mers ; les 
parties brillantes représentaient les continents. D'autres 
eroyaient que les taches étaient des foréts oü quelques-uns 
plaçaient les chasses de Diane, et que les parties plus 
brillantes étaient les pays en plaine. D’autres voyaient en- 
core en elle une terre céleste très-légère, assez semblable 
à notre vif-argent ; ils disaient que ses habitants devaient 
prendre en pitié la Terre qui se trouve au-dessous d’eux 
et qui n'est qu'un amas de, boue. D'autres encore, et leur 
opinion singulière fut trés-répandue, ajoutaient que les 
étres qui la peuplaient étaient quinze fois plus grands que 
ceux de notre monde, et qu’à côté des arbres lunaires nos 
chénes n'étaient que de petits buissons. Tout cela pour ex 
pliquer la nature de la face lunaire éternellément tournée 
vers nous. 
Or, si nous ne voyons jamais qu’un côté de la Lune, 
réciproquement, il n’y a jamais qu'un côté de cet astre qui 
nous voit, de sorte que la moitié de la Lune a une lune qui 
est notre Terre, et que l'autre moitié en est privée. S'il y a 
des habitants sur l’hémisphère qui nous est opposé, ils ne 
se doutent pas de ce que c’est qu’un astre préposé à l’illu- 
mination des nuits, et ils doivent grandement s'étonner 
lorsque le récit des voyageurs leur rapporte l'existence de 
notre Terre dans le ciel. Pour peu que les voyageurs de 
là-bas ressemblent à ceux d'ici, quels contes ne doit-on pas 
débiter à notre propos? Mais aussi combien la Terre est 
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
   
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
  
   
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