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LE PREMIER BALLON A PARIS. 21
marche nocturne, la forme et la capacité du corps qu'on
portait avec tant de pompe et de précaution ; le silence qui
régnait, l’heure indue, tout tendait à répandre sur cette
opération une singularité et un mystère véritablement
faits pour en imposer à tous ceux qui n’auraient pas été
prévenus. Aussi les cochers de fiacres qui se trouvèrent
sur la route en furent si frappés que leur premier mou-
vement fut d’arrêter leurs voitures et de se prosterner
humblement, chapeau bas, pendant tout le temps qu'on
défilait devant eux.
« Enfin le ballon arriva par les rues des Petits-Champs,
de Richelieu, de Saint-Nicaise, par le Carrousel, le Pont-
Royal, 1a rue de Bourbon et les Invalides (5 kilomètres),
à l’École-Militaire, où il fut déposé au milieu du Champ
de Mars, dans une enceinte disposée pour le recevoir.
« Les lisières qui l’enveloppaient servirent à le retenir
en place, au moyen de petites cordes fixées vers le méri-
dien du Globe, et qui furent arrêtées dans des anneaux
de fer plantés en terre.
« Dès l’instant où le jour parut, l’on s’occupa à faire du
gaz ; à midi il était assez plein pour avoir une belle forme,
il fallut peu de temps pour achever de le remplir ; mais
l'on réservait au publie le reste de l'opération, pour lui
donner une idée de la maniére dont on produisait le gaz.
« Le Champ de Mars était garni de troupes, les avenues
étaient gardées de tout côté : les ordres étaient donnés
pour faciliter la marche des voitures et prévenir les acci-
dents. A trois heures l'on vit le Champ de Mars se couvrir
de monde; les carrosses arrivaient de toutes parts, et bien-
tôt il ne purent aller qu’à la file. Les bords de la rivière,
le chemin de Versailles, l’amphithéâtre de Passy étaient
garnis d’une foule immense de spectateurs. L'hôtel de
l’Ecole-Militaire et le Champ de Mars renfermaient la plus