LE BOMBARDIER FRANÇOIS. 5
guerre n’en donnoient pas le loifir ; & quand bien même il s’en fe-
roit trouvé qui euflent fgû l’art de jetter les bombes , ce n’elt point
à un fiége dans une batterie, qu'on eft en fituation de faire les cal-
culs que la Théorie demande.
Il y a long-tems que ces difficultez m'ont fait appercevoir , qu’il n’y
avoit guére d'apparence que les Bombardiers fiflent jamais un grand
ufage des regles ; cependant depuis l’établiffement des Ecoles, tous
ceux qui en font inftruits conviennent qu’elles font les feules pour ti-
rer jufte. Inutilement fera-t-on des remarques fur des épreuves à dif-
ferentes charges & à differents degrez d’élevation , avec toutes fottes
de mortiers; l’expériénce montre affez qu’on n’en peut tirer une gran-
de utilité, puifqu’aufli-tôt qu’on vient à changer de mortier & de pou-
dre, on a des portées toutes differentes de celles qu’on s’étoit propo-
fé, parce qu’il eft moralement impoffible que les chofes puiflent fe
rencontrer les mêmes en tout. [
N’y. ayant donc que les Mathématiques qui fourniffent unc méthode
exacte, j'ai fongé aux moyens de faire une table qui renfermât ce que
la Théorié peut donner de plus certain, & dont l’ufage fût fi ailé, que
les moindres Bombardiers puflent s’en fervir fans être prévenus d’aucun
principe. Sila pratique ne répond pas quelquefois à toute la précifion
qu’on peut attendre de ces tables, ce n’eft qu’aux accidens qui furvien-
nent qu’on doit en attribuer la caufe ; mais ces accidens font communs
dans l’ufage ordinaire des Bombardiers, comme dans celui que l’on pro-
pofe ici; avec cette difference, qu’ils ne viennent à leurs fins qu’à force
de tâtonner, & en tirant une quantité debombes inutiles, avant que de
parvenir au degré & à la charge qu’ils cherchent , au Heu que nous trou-
vons tout d’un coup lun & l’autre pour toutes les diftances. imagina-
bles où oñ veuf envoyer une bombe comme on leva voir. ;
“ Etant prévenu que fi l’on tire plufieurs bombes fous differens degrez
d’élevation , en fe fervant toujours de la même charge, les amplitudes
des paraboles feront dans la raifon des fimus des angles doubles de
ceux où le mortier aura été pointé * ; on fera attention que /e fguus
total étant le plus grand de tous les finus, il fera par conféquent celui
du plus grand angle double, fous lequel une bombe puifle être jettée :
ainfi la plus grande portée fera donc fous 45 degrez,-mais le finis de
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+ C’eft fur ce principe que la Table a êté calculée. Voyez. le Cours de Mathematique de
P Auteur, Art. 746 & 748, où cela fe trouve demontre , de même que tout ce qui peut
appartenir à la theorie du jet des Bombes.
à