LE BOMBARDIER FRANÇOIS. “283
étincelle ; l’on'verra encorè que fi l'on en met: fur une pelle rougie
au feu, il ne s'enflammera point non plus , mais fe reduira en eau,
& {i on laifie refroidir cette liqueur , elle fe condenfera.tout de nou-
veau. Mais ce qui arrive quand le falpêtre eft devenu liquide par la
chaleur, foit dans un creufet ou dans une cuillier de fer rougie, c’eft
que fi l’on jette dedans un morceau de bois , fur le camp on le voit
enflammer & confumer dans un moment , fans qu’il en refte aucune
partie, ce qui ne peut arriver autrement ; car l’air fubtil qui eit dans
cette liqueur, fe meut avec une vitefle infinie , penetre les pores du
bois , en fait fortir Phuile, à qui il ne falloit que du mouvement
pour être changée en flamme , & les parties les plus grofliéres font
frottées avec tant de'violence par celles de la liqueur , qu’elles de-
viennent imperceptibles à la fin. Mais pour preuve encore que le
falpètre n’eft point inflammable ,. & qu’il n’elt qu’un fel , malgré un
préjugé fi generalement reçû , c’eft que fi l’on en pulverife avec du
foufre, & qu’on mette ce mélange dans un creufet {ur le feu, il s’ex-
halera une grande flamme blanche qui fe diffipera avec l’air fubtil du
falpêtre , Gui s'étant évaporé , ne laiflera plus qu’un fel au fond du
creufet, qui eft une matiere blancheâtre que les Chymiftes appellent
Sel Policrefte.
Le foufre tel qu’on employe pour faire la Poudre j doit être con-
fidéré comme une huile unie à beaucoup de fel fixe, ce qui eft aifé à
connoître quand on en fait l’analife. Si le foufre n’étoit compofé que
d'huile , 1l exhaleroit une grande flamme blanche comme les autres
matieres graÎles ; mais le {el fixe dont il eft mêlé l’empêchant. de s’éle-
ver, il ne produit qu’une petite’ flamme bleuâtre ; & fi au contraire
Pon y met du fel volatil , il fera alors une grande flamme blanche
avec détonnation. .
Comme il ne faut qu’échauffer l’air pour le rarefier au point que
fait la Poudre , fi le foufre pulverifé senflammoit fort promptement,
il fuffiroit feul pour en produire tous les’ effets: mais comme nous
avons vû que pour lui donner plus d’attivité , 1l ne falloit qu’y join-
dre du falpêtre , 1l paroît qu’une Poudre qui feroit compofée de ces
deux matieres feulement , devroit convenir parfaitement à la rarefaétion.
Cependant 1l eft à remarquer que quand le foufre allumé vient à échauf
fer l’air fubtil du falpêtre avec lequel 1l eft mélé, ce dernier refpand
à l’inftant un vent fi fubit & fi violent , que s’il a l’avantage de rendre
plus active la flamme du foufre , il a auffli le défaut de l’éteindre
un inftant après , à moins que ge autre caufe ne contribue à la
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