LE BOMBARDIER FRANÇOIS. 315
La poudre eft , après le falpêtre, la chofe la plus effentielle aux
compofitions des feux d’artifice. On en employe de la grainée com-
me celle à canon, mais il faut en avoir en poufliere comme celle qui
refte dans les moulins après qu’on en a féparé le grain ; & fi l’on ne
peut en avoir de cette efpece ,il faudra en écrafer de la grainée qu’on
paflera enfuite par un tamis fin. C’eft de cette efpece de poudre que
Je parlerai, en donnant la quantité qu’il en faut mettre dans les com-
pofitions ; ainfi quand dans la fuite on verra le nom de poudre fim-
plement, on entendra de la poudre en pouffiere.
Le foufre elt la troifiéme chofe qu’il faut préparer , il fe vend en
groffes billes qui viennent du pays de Liege ; de celles-là les meilleu-
res font celles qui font de couleur de citron-clair & qui font lege-
res, les rougeâtres & lourdes étant d’une qualité inferieure : on en
tire de Hollande en petites billes d’environ 4 lignes de diametre,
& c’eft le meilleur de tous les foufres , excepté celui qu’on fera fon-
dre comme on l’enfeignera ci-après. Il faudra qu’il foit tout pul-
verifé & paffé au tamis fin : ce fera de celui qu’on aura mis en cet
état dont j’entendrai parler , quand dans la fuite je nommerai du
foufre fimplement.
Je n’ai jamais vû employer d’autres bois pour faire de la poudre &
des artifices que celui de Bourdenne , 1l doit être coupé au printems
quand 1l eft plein de feve, afin qu’on le puifle peler aifément & qu’il
{e trouve plus de fel dans le charbon. {
Le bois de Bourdenne de la groffeur d’un pouce de la main eft le
meilleur, on ne laifle pas cependant d’en employer du plus gros quand
l’écorce en eft toute ôtée & qu’il eft bien fec; on le coupe en mor-
ceaux d’environ deux pieds de longueur , on le brûle enfuite dans un
four y, & quand il eft parfaitement penetré du feu fans fumer davan-
tage, on le tire dans un grand vaifleau de cuivre ou de fer, puis on le
couvre d’un couvercle fait exprès afin de l’étouffer. Il faut bien pren-
dre garde d’éteindre ce charbon avec de l’eau, cela le gafteroit abfo-
lument, & j'ai fait cent épreuves où j'ai toujours trouvé que la poudre
faite avec du charbon étouffé , étoit incomparablement plus fubtile,
plus forte, & gardoit bien plus long-tems fes qualitez, que celle dans
la compofition de laquelle 1l étoit entré du charbon éteint avec de
l’eau. La qualité de la poudre & des artifices fera auffi confiderable-
ment meilleure , quand on employera le charbon immediatement après
qu’il fera étouffé, l’experience ayant fait voir que plus il refte en nature,
plus 1] perd de fa bonté. Avant de e {fervir , il faut le faire bien
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