I >.() LES INSTRUMENTS, LES MÉTHODES ET LE DESSIN TOPOGRAPHIQUES.
suivre ou patronner pendant plus d’un siècle et demi les opé
rations, à jamais mémorables, relatives à la détermination de la
grandeur et de la figure de la Terre. En un mot, on doit con
sidérer l’illustre Picard comme le véritable fondateur de la
Géodésie moderne.
En lisant attentivement le récit très simple en apparence des
opérations de la mesure de la Terre, on s’aperçoit assez vite
que les méthodes actuellement en usage pour la rectification
des instruments y sont clairement indiquées, et l’on devine
l'influence qu’ont dû exercer les travaux de Picard sur la di
rection de tous ceux qui ont été entrepris après lui, le plus
souvent à leur insu, aussi bien par les topographes que parles
géodètes. Nous allons, d’ailleurs, retrouver la trace de ses
méthodes générales à propos du nivellement ( 1 ).
(’) La réputation de l’abbé Jean Picard n’est sans doute pas à faire et il suf
firait de rappeler l'hommage que lui a rendu Arago pour être renseigné à la
fois sur la supériorité de son talent et sur la rare élévation de son caractère.
Picard, qui avait eu, en effet, le mérite de convaincre Colbert de la né
cessité de créer l’Observatoire de Paris, lui avait encore conseillé d’y appeler
Cassini, puis Rœmer qu’il avait décidé lui-même à accepter le patronage
du grand ministre. « Se créer ainsi des rivaux dans une carrière où l’on
avait toute raison d’aspirer au premier rang, dit Arago, c’est le sublime
du désintéressement; l’amour des Sciences ne se manifeste certainement
jamais d’une manière plus éclatante. »
Nous ne saurions avoir la prétention de rien ajouter à la force de ce
jugement d’un homme aussi clairvoyant et aussi pénétré lui-même des
plus nobles sentiments. Nous croyons néanmoins devoir dire quelques mots
des immenses services de notre grand compatriote (dont le nom est à peine
cité, à la suite de celui de Cassini, dans le Siècle de LouisXIV, de Voltaire),
qui méritent ou plutôt doivent être mis au premier rang dans une Notice,
destinée à retrouver, aussi exactement que possible, la généalogie des in
struments et des méthodes d’observation qui ont contribué à donner à l’art
de la Topographie l’intérêt et le crédit qu’il a acquis de notre temps.
Tout d’abord, sans oublier ses précurseurs et en particulier son maître
Gassendi, on peut dire que c’est à Picard plus qu’à tout autrequesont dus les
progrès de l’Astronomie en France. Nous venons de rappeler que c’était lui
qui avait inspiré la création de l'Observatoire de Paris; c’est lui aussi qui a
inauguré la célèbre et précieuse publication de la Connaissance des Temps.
C'est lui qui, avec le jeune Danois Olaüs Itœmer, dont il avait deviné le
génie et peut-être déterminé la vocation, installa à l’Observatoire des in
struments nouveaux (sans obtenir toujours ceux qu’il demandait et qu’on
y plaçait plus tard), les observations régulières des passages des astres au
méridien, en associant l'horloge astronomique et la lunette, et de ceux des
étoiles pendant le jour; et ce n’est pas tout, bien s’en faut, mais ce qui in
téresse plus directement la Géodésie et la Topographie, c’est que Picard
et son savant collaborateur et ami de la Hire [qui représentaient à eux