CHAPITRE II. — LA TOPOGRAPHIE DANS TOUS LES TEMPS. 381
On est même autorisé à supposer que c’est en rapportant,
sur leurs tablettes, à une échelle déterminée, les mesures pro
jetées sur l’horizon qu’ils durent s’aviser des propriétés des
figures planes et jeter les bases de la Géométrie.
Quoi qu’il en soit, quand l’art de bâtir eut fait d’assez grands
progrès, on ne saurait douter que les architectes procédèrent
de la même manière pour dessiner leurs projets, c’est-à-dire
qu’ils tracèrent d’abord ce que l’on a continué, dans les chan
tiers, à appeler le plan par terre. Mais, pour définir plus
complètement l’œuvre qu’ils avaient conçue, ils eurent besoin
d’essayer, comme on le fait encore bien souvent, de représenter
avant l’exécution l’ensemble de l’édifice, et il est extrêmement
probable qu’ils firent usage pour cela d’une sorte de Perspec
tive plus ou moins conventionnelle ( 1 ). Ils ne durent pas tarder
plus civilisés de notre temps. Nous ne saurions mieux faire, pour con
vaincre le lecteur, que de donner un extrait abrégé de l'article Agrimensor,
de M. G. Humbert, dans le Dictionnaire des Antiquités grecques et ro
maines publié par MM. Ch. ÜAREMBERGet Edm. Saglio (Paris, Hachette; 1877).
« Les agrimensores, appelés d’abord compedatores ou gromatici, noms
tirés des instruments dont ils faisaient usage (pes, pied; groma, équerre
d’arpenteur), avaient un rôle important et ont laissé des Ouvrages utiles
pour la connaissance de l’histoire de la propriété.
» On a pensé que les augures avaient été les premiers arpenteurs.
» Les champs étaient séparés par un espace de cinq pieds [finis) qui ser
vait souvent de sentier et n’était pas cultivé.
» Dans les camps, les opérations géométriques étaient faites par des offi
ciers, sans doute à l’aide d’experts (agrimensores), mais plus tard le soin
en fut confié à un officier spécial [castrorum metator).
» Sous l’empire, les colonies possédaient un cadastre complet. Octave
avait fait faire le Recueil de toutes les mesures de longueur usitées dans les
villes et les provinces. On établit des écoles publiques pour former les
mensores; les agrimensores, convertis ou réduits au rôle d’experts, aidaient
à retrouver les anciennes limites par l’inspection des bornes ou des docu
ments tels qu’écrits, cartes, plans [forma, pertica, centuratio, œs, ty-
pon, notatio, cancellatio, limitatio) ou des livres terriers (liber subseci-
vorum, commentarii, divisiones).
» Les principaux écrits des gromatici veteres ou rei agricolæ scriptores
furent conservés en partie ou résumés par les praticiens leurs successeurs.
Cette collection d’Ouvrages écrits entre le i er et le vi s siècle de notre ère
a été éditée depuis peu d’années avec une critique suffisante. »
Au x° siècle, Gerbert enseignait la Géométrie pratique, surtout d’après
des Ouvrages dont il avait, à Bobio, une copie dite aujourd’hui à'Arcérius
conservée à la bibliothèque de Wolfenbuttel.
(*) On trouvera dans l’une des notes placées à la fin du second Volume
des figures qui donneront une idée de la manière dont les architectes de
la plus haute antiquité traitaient la perspective des édifices.