CHAPITRE II. — LA TOPOGRAPHIE DANS TOUS LES TEMPS. 3gg
se rapproche, par la manière dont il est dessiné, de ceux dont
nous voulons nous occuper.
Ces exemples, que nous pourrions multiplier, semblent suf
fisants pour démontrer que la Topographie pittoresque fut celle
qui s’imposa lors de la Renaissance, comme elle s’était tout
d’abord et naturellement imposée dans l’antiquité.
Nous pensons donc en avoir suffisamment expliqué l’origine
et nous allons essayer d’en faire connaître les progrès, parti
culièrement à partir de l’invention de la Gravure. Jusque-là
( si l’on excepte les médailles et les manuscrits sur vélin ornés
de miniatures, rarement copiées d’ailleurs) les œuvres des
artistes n’avaient qu’un exemplaire ( 1 ) et ne pouvaient être,
par conséquent, connues que d’un bien petit nombre de pri
vilégiés ( 2 ).
La fabrication du papier, qui date du commencement du
xiv e siècle, avait permis déjà d’augmenter plus aisément le
nombre des copies, mais l’invention de la gravure sur bois,
puis celle de la gravure sur cuivre firent bientôt pour le dessin
ce que l’invention des caractères mobiles avait fait pour l’écri
ture. Les images se multiplièrent et se répandirent partout et
les artistes en produisirent de plus en plus.
Les vues des villes célèbres, des monuments qui les ornaient,
des châteaux forts, des palais et des résidences princières
{') Certains verriers reproduisaient leurs œuvres en conservant les patrons
de leurs découpures qui pouvaient servir à répéter les mêmes sujets.
( 2 ) Les albums manuscrits contenant les vues ou les plans des forte
resses destinés aux rois ou aux princes n’ont pas toujours été gravés.
On peut citer, par exemple, le Recueil en trois volumes des places fortes
du royaume fait par les ordres du marquis de Seignelay, pour Louis XIV,
avec des frontispices merveilleusement enluminés, d’après les dessins de
Lebrun, et le bel Atlas en quatre volumes exécuté au commencement de
ce siècle, pour le premier Consul, qui renferme des notices sur les fron
tières et plus de 25o plans à l’échelle de 6" pour ioo toises; mais il y en a qui
datent de beaucoup plus loin ; ainsi, il existe à la Bibliothèque Nationale,
au département des Manuscrits, un Recueil des plus intéressants, quoique
inachevé, ayant appartenu à Charles VII et qui a pour titre : Armorial de
l’Auvergne et du Bourbonnais, dans lequel sont représentées des vues de
villes et de châteaux, dessinées d’ailleurs très inégalement.
Nous reproduisons l’une de ces vues, celle de la ville de Saint-Pourçain
(fig. i43 ), qui donne une idée avantageuse du talent des peintres topo
graphes du xv° siècle et qui montre bien la manière dont ils comprenaient
leur art dès lors très attachant.