CHAPITRE II. — LA TOPOGRAPHIE DANS TOUS LES TEMPS. 413
travaux qu’il faisait entreprendre pour la défense du pays,
la création, l’amélioration des ports, les routes qui traversaient
la France et rapprochaient les provinces les plus éloignées,
le canal du Languedoc unissant l’Océan à la Méditerranée,
toutes ces grandes œuvres si éminemment utiles compensaient
ou tout au moins atténuaient, au point de vue immédiat de
l’intérêt national, l’effet des prodigalités du Roi à Versailles, à
Marly et dans tant d’autres fastueuses résidences ('). Mais
partout il lui avait fallu et il avait eu l’heureuse fortune de ren
contrer des hommes du plus grand mérite pour réaliser ses
vastes projets et jusqu’à ses fantaisies.
Sans parler des admirables artistes qui construisaient et dé
coraient ses palais, en n’envisageant que les études de terrain
qui sont de notre sujet et les travaux prodigieux qui rappelaient
ceux des Romains, les noms de Vauban, de Riquet, de Le
Nôtre ( 2 ) se présentent aussitôt à l’esprit, et l’on se souvient que
Perrault traduisait Vitruve et essayait de restituer ses dessins,
non seulement pour les architectes, mais aussi pour les ingé
nieurs qui devaient retrouver dans cet auteur célèbre la trace
de précieuses traditions encore peu ou mal connues.
On sait la correction des plans de fortification exécutés
sous la direction ou le contrôle de Vauban, et l’on peut ima-
(') A propos de Versailles, un publiciste de nos jours fait les réflexions
suivantes dont il y a lieu de tenir grand compte :
« Si l’on considère que la construction et la décoration du palais ont
largement profité au développement des arts, contribué à établir la supé
riorité des peintres, des sculpteurs et des architectes de notre pays sur toute
l’Europe, ont singulièrement développé l’activité industrielle de la France,
on reconnaîtra peut-être que ces prodigalités ne sont pas restées stériles. »
(Jules Guiffret, Le château de Versailles, dans La France artistique
et monumentale publiée par M. Henry Hayard à la Librairie illustrée.)
( 3 ) On s’étonnera peut-être du rapprochement des noms de Vauban et
de Le Nôtre. Sans vouloir établir aucune comparaison, on ne saurait mé
connaître les genres de mérite si variés que suppose l’œuvre de Le Nôtre.
Rien qu’à Versailles, l’agrandissement et l’embellissement du parc de
Louis XIII, les marais fangeux du fond devenus le grand Canal, la déri
vation de l’Eure, l’aqueduc de Maintenon, les réservoirs de Satory, en un
mot la machinerie des grandes eaux, lui font autant d’honneur qu’aux
ingénieurs célèbres qui ont concouru à l’accomplissement de cette féerie
ajoutée à toutes celles qu’il avait réalisées avec ses plantations et ses tapis
de verdure, en préparant un cadre merveilleux aux œuvres de tant d’artistes
de génie.