Full text: Aperçu historique sur les instruments et les méthodes. La topographie dans tout les temps (Tome 1)

CHAPITRE 11. — LA TOPOGRAPHIE DANS TOUS LES TEMPS. 4 1 5 
Au surplus, les plus illustres géographes de ce temps, à 
commencer par Sanson, d’Abbeville (*), cherchaient à donner 
un aspect agréable à leurs caries, dès que la grandeur de 
l’échelle le permettait. La méthode qu’ils employaient pour 
exprimer le relief du terrain et qui avait eu partout un grand 
succès, notamment en Hollande où les Allas célèbres de Mer 
cator etd’Ortélius avaient paru au siècle précédent, consistait 
à représenter les montagnes par des séries de mamelons dessi 
nés en perspective, rabattus dans le sens du Sud au Nord et 
éclairés du côté de l’Est (la carte étant supposée orientée le 
Nord en haut) ( 2 ). On en trouvera un exemple sur la PL VIII, 
reproduction réduite de la Carte d’une partie de l’Andalousie. 
Il était donc naturel que les topographes eussent une ten 
dance à continuer à faire usage d’une convention qui ratta 
chait leur art au paysage et à laquelle on a donné, comme on 
sait, le nom de demi-perspective. 
Nous avons vu cependant, par les exemples empruntés à 
(’) Sanson était justement estimé, particulièrement à la Cour, où il ne 
fréquentait pas. Les princes, les maréchaux allaient le consulter. Louis XIII, 
pour s’instruire, avait été son hôte, et il avait donné également des leçons 
au jeune roi Louis XIV. Ses cartes semi-topographiques, comme celles d’Or- 
télius et de Mercator, avaient un grand charme, une grande clarté qui 
font trop souvent défaut à nos cartes modernes, en dépit de leur exacti 
tude. Celles-ci sont, en effet, généralement chargées de détails plus nom 
breux que n’en comporteraient leurs échelles, ce qui déroute et dépite 
souvent le lecteur. 
( 3 ) On a l’habitude de tourner en ridicule ce mode de représentation qui 
avait, en effet, dégénéré entre des mains moins exercées. Ainsi, on a pu 
comparer des chaînes de montagnes tracées irrégulièrement ou uniformé 
ment tantôt à des pains de sucre et tantôt à des accents circonflexes em 
boîtés les uns dans les autres, et Lacroix disait avec raison qu’il eût au 
tant valu écrire sur la carte : « Ici il y a des montagnes. » Mais, si cette 
critique est méritée par beaucoup de géographes maladroits, il n’est assu 
rément pas permis de l’étendre sans ménagements aux œuvres des auteurs 
que nous venons de citer ni à celles de plusieurs de leurs successeurs. 
Sans doute, la Cartographie proprement dite et le figuré des montagnes 
en particulier laissèrent nécessairement beaucoup à désirer tant que l’on 
n’eut pas recours à la triangulation, et tant que les montagnes restèrent 
difficiles sinon impossibles à explorer; mais à chaque jour suffit sa peine, 
et l’on serait mal venu à méconnaître, malgré quelques imperfections 
jusque-là inévitables, les admirables progrès du dessin topographique, du 
xvi 8 au xviii 8 siècle. C’est cependant ce qu’ont fait ceux qui ont cru voir 
naître la Topographie avec la Carte de Cassini, bien loin elle-même d’être 
sans défauts et qui a plutôt fait faire un pas en arrière à l'Art de figurer 
le terrain.
	        
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