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assez vraisemblable que la crainte de pareilles entraves a été la
cause principale de l’abandon du projet déjà mentionné de Sabine. Il
semble pourtant que cette appréhension a été un peu exagérée.
Déjà le succès qui couronna les recherches faites en 1861 et 1864
pour le jalonnement du réseau de triangles, doit mettre en évidence
que les occasions propres à l'observation d’objets éloignés n’ont point
été rares, et que le temps serein n’est nullement un cas exceptionnel.
C’est encore confirmé par l’expérience de plusieurs autres navigateurs
arctiques et par leur récits des conditions climatologiques qui y régnent.
Les observations mentionnées ci-dessus à Mosel Bay et à l’Isfjorden,
en fournissent une confirmation ultérieure. Déjà à première vue on
trouve que l’atmosphère était assez fréquemment libre de nuages
pour admettre des observations célestes, pins particulièrement à l’Is
fjorden. On pourra objecter, il est vrai, contre ces deux stations,
qu’elles sont situées plus près de la surface de la mer que celles du
réseau de triangles, et qu’ainsi elles ne sont pas propres à fournir des
données pour jnger de l’état atmosphérique à ces dernières; mais les
points situés plus haut étant dans la règle moins sujets aux brouil
lards et à la brume, le résultat obtenu près de la mer ne doit pas
conduire à des espérances trop favorables, plutôt le contraire.
Un examen plus attentif des observations mentionnées semble
indiquer que les mois d’avril et de mai, ainsi que la fin de l’été,
sont les saisons les plus propres à l’observation des angles terrestres.
On peut du reste compter d’avoir dix-huit bonnes occasions pour
ces mesures dans le cours de l'année, entre avril et septembre
inclusivement.
La répartition des jours clairs et des jours nuageux varie toute
fois considérablement d’année en année. Pendant ses explorations de
1861. Chydenius trouva les mois de juin—septembre les plus favo
rables pour l’exécution des travaux. C’est également le cas de mai,
quand l’état de la glace n’y porte pas obstacle.
Il y a encore lieu de considérer une circonstance qu’on remarque
aussi dans les parties montagneuses de la Suède, quoique non à
un tel degré que dans les parages dont il est question ici. L’àir au
Spitzberg, quand il est libre de brouillard, devient souvent d’une
clarté et d’une transparence tellement excessives, qu’on peut à peine
les concevoir sans avoir vu ce phénomène de ses propres yeux. On
ne voit alors pas la moindre trace de ces tons bleuâtres dont sont
teints dans nos climats les objets éloignés, ceux-ci présentant essen
tiellement au Spitzberg les contrastes les plus éclatants de blanc et
de noir, ce qui doit faciliter l’observation des mires aux grandes dis
tances que l’on sera quelquefois contraint d’employer.
Des faits que nous venons d’exposer, on doit conclure que les
conditions atmosphériques du Spitzberg sont sans doute assez défavora-