VII
Il desirait alors obtenir une chaire de raathe'inatiques à l’université; mais comme
l’université avait déjà deux professeurs en mathématiques et que le gouvernement ne le
trouvait pas convenable d’en nommer un troisième, il resta sans place jusqu’en 1828, lors
qu’on lui conféra les fonctions de Mr. Hansteen pendant son absence dans un voyage en
Sibérie. En septembre 1827 on le nomma membre de la société royale des sciences à
Throndhjem.
Depuis son retour en Norvège il poursuivit infatigablement ses recherches scientifi
ques, et peut-être que, surtout la dernière année de sa vie, il y mit trop d’activité et
d’efforts, étant naturellement souffrant et d’une constitution faible et sensible. En dé
cembre 1828 au fort de l’hiver il entreprit un voyage pour les fonderies de fer de Fro-
land près d’Arendal, où se trouvait alors sa future Mad elle Kemp ( à présent M dme Keil-
hau). Vers la mi-janvier 1829 il y tomba malade, et malgré les soins prodigués par sa
fiancée et par la famille de la maison (Mr. S. Smith était alors propriétaire desdites
fonderies de fer), il mourut d’une phtisie le 6 avril alité depuis trois mois*).
Les travaux d'Abel qui commencèrent à fixer l’attention des savants furent d’abord
son mémoire sur l’impossibilité de la résolution générale des équations algébriques qui
passent le quatrième degré mentionné plus haut, et dont le mémoire No. II. de cette
édition n’est qu’une nouvelle rédaction avec des développements ultérieurs, et ensuite
ses recherches sur les fonctions elliptiques. En même temps que notre Abel, et sans
connaître les ouvrages de ce dernier, Mr. Jacobi de Koenigsberg commença à traiter la
théorie des fonctions elliptiques. Ainsi une rivalité s’établit entre ces deux génies supé
rieurs dans leurs traités sur lesdites fonctions. Abel me dit que lors de son séjour à
Paris en 1826, il avait déjà achevé la partie essentielle des principes qu’il avançait dans
la suite sur ces fonctions, et qu’il aurait bien voulu remettre la publication de ses décou
vertes jusqu’à ce qu’il en eût pu composer une théorie complète, si en attendant Mr. Ja
cobi ne s’était mis sur les rangs.
Mr. Crelle dans une lettre, adressée à M. Abel en date du 18 mai 1828, s’exprime
comme suit:
’’Depuis quelque temps on commence à apprécier vos ouvrages de plus en plus.
Mr. Fuss m’écrit de St. Petersbourg qu’il en a été ravi. Voici ce que m’écrit Mr.
Gauss de Goettingue que j’avais également prié de m’envoyer quelque chose sur les
fonctions elliptiques dont il s’occupe, comme j’ai appris, plus de 30 ans. ’’’’D’autres
occupations m’empêchent pour le moment de rédiger ces recherches. Mr. Abel m’a
prévenu au moins d’un tiers. Il vient d’enfiler précisément la même route dont je suis
sorti en 1798. Ainsi je ne m’étonne nullement de ce que, pour la majeure partie, il
en soit venu aux mêmes résultats. Comme d’ailleurs dans sa déduction il a mis tant
*) Un journal français dont je ne me rappelle pas le titre, m’est venu sous les yeux, où l’on a rapporté
qu’ Abel est mort dans la misère. On voit par les détails ci-dessus que ce rapport n’est pas
conforme à la vérité.
’ A#