LE MONDE DES NOMBRES
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sait à ces peuples le nom d’amis de la science. A Pythagore, et aux
philosophes grecs en général, revient l’honneur d’avoir distingué
et opposé l’une à l’autre l’Arithmétique théorique et la Logistique
ou art du calcul.
2. Qu’est-ce qu’un nombre? — On a beaucoup discuté et
l’on discutera longtemps encore sur l’origine et la signification
logique de la notion de nombre. Fort heureusement cette notion
est de celles qui se passent de définitions et de commentaires.
Depuis l'époque reculée où l’humanité a appris à compter, le
nombre est devenu l’une des données fondamentales sur lesquelles
travaille notre pensée, donnée si immédiate, si claire à l’intelli
gence, qu’en cherchant à l’analyser, nous ne réussissons tout
d’abord qu’à l’obscurcir. C’est pourquoi l’Arithmétique a pu
s’édifier sur des définitions verbales et incomplètes, et n’en être
pas moins tenue dans tous les temps pour la science parfaite par
excellence.
Soit une collection d’objets, par exemple un tas de pommes de
même grosseur. Cette collection ou tas définit un nombre cardinal,
lequel est plus ou moins grand suivant que le tas est plus ou moins
gros. Formons en particulier, et rangeons devant nous une file de
tas de pommes comprenant respectivement une pomme, puis deux
pommes, puis trois pommes, etc. Cette file de tas définit une suite
de nombres dont nous pouvons comparer les grandeurs relatives.
Chaque tas contient une pomme de plus que le tas précédent,
une pomme de moins que. le tas suivant. Chaque tas est plus
grand que tous les tas précédents, plus petit que tous les tas
suivants.
La suite de nombres que nous définissons au moyen d’un tas de
pommes, nous pourrions aussi la définir au moyen d’un las de
poires ou d’un tas d’objets quelconques. C’est pourquoi nous di
sons qu’ « un nombre cardinal est une collection d’objets, distincts,
mais quelconques, de la nature desquels on fait abstraction ».
Nous conviendrons d’appeler « unités » ces objets, sur lesquels
nous sommes en état de raisonner lors même que nous les avons
dépouillés de toute qualité physique.
Nous appellerons « suite croissante des nombres cardinaux » la
suite des nombres qui comprennent respectivement une unité,