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ŒUVRES DE FERMAT. - CORRESPONDANCE.
Et pource qu’il entend beaucoup mieux que moi toutes ces ma
tières, et qu’il a répondu article par article à tous ceux de votre dite
lettre, je m’abstiendrai de vous ennuyer davantage par mon discours,
atiu de vous laisser plus de temps pour examiner la réponse qu’il a
faite à votre lettre. S’il me l’eût apportée plus tôt, il nous auroit tous
deux soulagés : moi, d’écrire d’un sujet qui passe mes forces, et vous,
de lire une si mauvaise lettre. Mais, comme c’en étoit déjà fait, je n’ai
pas voulu perdre ma peine et j’ai pensé qu’il valoit mieux vous fati
guer de cette lecture, et vous donner par même moyen des preuves
du soin où je m’étois mis de m’acquitter de ce que je vous devois,
que de vous laisser venir la pensée que je m’en serois peut-être
oublié, et que j’aurois été bien aise qu’un autre m’en eût déchargé.
Au reste, Monsieur, je vous prie d’excuser ce qui peut m’être
échappé de libre en répondant à votre sceptique. J’aurois agi avec
tout autre respect si mon discours se fût adressé à vous; mais, bien
loin de craindre que pour cela vous me refusiez justice, je prends
même l’assurance de vous demander quelque grâce. Il y a des ren
contres où un peu de faveur n’offense point l’équité et, si dans
celle-ci vous vous mettez de mon parti, je puis vous assurer qu’en
toute autre je serai entièrement à vojjs, et que vous pourrez faire
état d’avoir toujours prêt en moi, Monsieur,
Un très humble et très obéissant serviteur,
Clerselier.