156 S. von Mangoldt. III 2. Les notions de ligne et de surface. L. Zoretti.
largeur, limite, il lui est impossible de démontrer que les lignes
dont il parle vérifient sa définition. Il est donc obligé de supposer
l’existence de propriétés qu’il n’aura pas explicitement énoncées; il
revient au même d’en faire autant de postulats. C’est bien à peu près
ainsi [cf. n 08 4 et 8] que les choses se sont passées pendant longtemps,
au moins dans les applications de la notion de ligne à l’analyse. Mais
en géométrie pure, il n’en est point de même. On peut constater en
effet qu’on n’a jamais (jusqu’à G. Cantor) fait de théorie générale de
la ligne. On a donc pu, et nous allons nous en rendre compte, se
passer, sans faute de logique, d’une définition de ce mot. Seulement,
l’auteur ne dit jamais: je ne définis pas la ligne en général et je n’en
parlerai pas; en sorte qu’il importe avant tout de montrer qu’on peut
obtenir toute la géométrie dite élémentaire 16 ) sans user de cette défi
nition. Une première remarque, c’est qu’on n’étudie pas la ligne en
général, mais des lignes particulières (droites, cercles, coniques, . . .) ce
qui au premier abord est bien d’accord avec l’opinion précédente. Il
suffira en effet d’appeler droite, cercle, conique, etc, des lieux géomé
triques ou, si l’on veut un mot plus moderne, des ensembles de points
jouissant de certaines propriétés. On pourra d’ailleurs dire que les
lieux ainsi définis sont des lignes ou des courbes, sans que cela
demande aucune démonstration et par conséquent aussi sans que cela
implique l’existence de propriétés communes et caractéristiques des
êtres ainsi catalogués.*
+ Mais la difficulté commence justement quand on veut démontrer
de telles propriétés, par exemple la séparation du plan en régions, la
convexité, l’existence des tangentes. On peut par exemple démontrer
que la droite partage le plan en deux régions 17 ). On entend par
la que le segment de droite joignant deux points d’un même côté de la
droite n’a avec celle-ci aucun point commun, et que le segment joignant
deux points de part et d’autre a au contraire un point commun avec
celle-ci. Si l’on veut démontrer de même que le cercle partage le
plan en deux régions, on ne peut plus donner à cette propriété le sens
qui vient d’être précisé. Il faut au mot segment de la phrase précé
dente en substituer un autre: celui de ligne vient naturellement à
l’esprit; or c’est précisément celui qu’on veut éviter. On pourra se
16) + On peut ainsi obtenir ce que F. Enriques appelle géométrie élémen
taire, géométrie projective, géométrie métrique. C’est dans FAnalysis situa
[cf. III 8] qu’intervient essentiellement la notion de ligne [cf. III 1, 21].*
17) + La place de cette propriété par rapport aux différents systèmes de
postulats est indiquée dans l’article III 1, n 08 9 et 10; voir surtout M. Pasch,
Vorlesungen über neuere Geometrie, Leipzig 1882.*